« Nos consultants sont bien payés, très compétents, appréciés de nos clients. Malgré tout, ils nous quittent en moyenne au bout de 3 ans. » Sylvie DRH +1 Consulting.

Depuis plusieurs années déjà, l’entreprise fait le constat d’un désengagement de ses managers, notamment des jeunes salariés qui n’hésitent pas à renoncer à des belles perspectives de carrière pour se consacrer à des projets personnels.

PC versus Mac
Le conflit des générations
Ce déclin de l’engagement en entreprise est souvent expliqué, dans la littérature managériale, comme une différence de générations. La Génération Y (les moins de 30 ans) ferait preuve d’un manque de maturité et serait inadaptée au monde de l’entreprise dominé par des managers issus de la Génération X (30-50 ans) et dirigée par la génération du baby-boom (les 55-65 ans nés juste après la Guerre).

Ce diagnostic qui alimente l’impression d’un conflit inéluctable entre générations passe à côté des causes profondes de ce phénomène et menace la rentabilité à terme de l’entreprise, déjà très secouée par le processus de globalisation et de management interculturel.


Génération X / Génération Y : des valeurs antagonistes ?
On distingue généralement 3 types de générations aux valeurs et motivations bien différentes. Tandis que la génération Baby-boom valoriserait l’effort et sacrifierait le bonheur immédiat pour privilégier une satisfaction et une sécurité confortable à long terme, la Génération X née dans les années 60 et 70 serait soucieuse d’un plus juste équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle et valoriserait les défis. Quant à la Génération Y, née dans les années 80, elle exigerait du travail qu’il contribue à son développement personnel immédiat et verrait les rapports hiérarchiques traditionnels comme un frein à la créativité.

De fait, il est fort étonnant de constater le retour en force de ce vocable générationnel pour interroger les liens entre salariés alors même que nos sociétés contemporaines se distinguent des sociétés traditionnelles par la substitution des liens de parenté et d’une organisation en âges, en liens juridiques matérialisés par la contractualisation libre entre individus comme fondement de l’ordre social (consacré par l’émergence de la modernité politique au XVIIe siècle).



Penser la redéfinition des âges de la vie
Parler en termes de Génération X et Y, c’est s’empêcher de voir ce que le philosophe Marcel Gauchet n’hésite pas à appeler une « mutation anthropologique », à savoir la « redéfinition des âges de la vie » (Le Débat, n°132, nov-déc. 2004).

Avec l’allongement de la durée de vie (30 ans en un siècle, soit l’équivalent d’une génération) et l’émergence d’un temps social tourné vers « l’avenir de l’histoire ouverte » et non plus d’une légitimité du passé, notre société vit en effet un « étirement des existences » qui a pour conséquence une redéfinition des étapes du cours de la vie.

De fait, nos sociétés subissent une pleine redéfinition du cadre de l’existence avec l’unification relative de l’enfance, de l’adolescence et de la jeunesse, et l’étirement de la vieillesse en une période d’indépendance pleine (60-80 ans).

Il s’agit dès lors de penser collectivement les conditions de ces nouveaux âges : que peut bien signifier entrer dans la vie quand à 18 ans, on a plus de 60 ans devant soi? Réduire la Génération Y à un manque de maturité ou à une génération Internet, c’est s’empêcher de comprendre la véritable transformation politico-sociale qui l’affecte.



A suivre : « Génération X / Génération Y (suite) : inventer la performance de demain en entreprise »

Leave a Reply